NON à l'usine de METHANISATION à LA TORCHE !

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2018-12-21 10:14

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Projet d'Usine de Méthanisation Bieville-Beuville

Inquiétudes et alertes de Scientifiques Normands

Document qui aurait du être remis à Mr LE JEMTEL, Commissaire d'Enquête Publique pour le projet d'exploitation d'une usine de méthanisation par la société AGRI METHA NACRE, le 11 juin 2018

Ce document a été envoyé à Mr L. Fiscus, Préfet du Calvados, Mme F. Buccio, Préfète de la Région Normandie, et Mr H. Morin, Président de la Région Normandie en Juin 2018.

 

Analyse du Projet AGRI METHA NACRE

Le projet de construction d'une usine de méthanisation « AGRI METHA NACRE » présenté en enquête publique à partir du 5 juin 2018 apparaît déficient et risqué sur plusieurs points détaillés succinctement ci-après:

  • La zone de localisation envisagée pour l'usine, les stockages et les épandages est très peuplée, avec dans un rayon de 5-6 km plus de 50000 habitants (Ouistreham, Epron, Hérouville, Blainville, Bénouville, Ranville, Saint Aubin d'Arquenay, Hermanville sur Mer, Colleville-Montgomery, Douvres la Délivrande, Lion sur Mer, Périer sur le Dan, Mathieu ...).

La démographie dans ce périmètre est en expansion constante, avec de nombreux projets immobiliers qui de fait se rapprocheront des surfaces impactées par l'usine, les stockages et les épandages.

  • Le méthane est un gaz hautement explosif, donc extrêmement dangereux en présence d'une telle population. Aucune mention n'est faite de surveillances particulières du site (la nuit, il y a même absence de personnel, pour un réacteur potentiellement explosif) ni de précautions prises vis à vis du risque terroriste. Des rejets accidentels ont déjà eu lieu à de multiples reprises dans ce type d'installations par le passé, causant plus de 300 morts, 150000 intoxications, et des dizaines de milliers d'évacuations au monde et en France (source ARIA 1). Les causes sont multiples et correspondent typiquement au cadre du projet AGRI METHA NACRE.
  • Un autre gaz est simultanément dégagé, l'hydrogène sulfuré qui même en très petite quantité est beaucoup plus dangereux, voire mortel (dose létale 1000 ppm, premiers signes d'irritation et gênes dés 100 ppm (2 gouttes dans un litre) !) (7). Un gaz toxique contenant de l'hydrogène sulfuré à odeur d'œuf pourri sera donc inhalé en permanence par la population. Ce gaz est un irritant des yeux, poumons, et muqueuses, et est cancérogène (2). Il forme avec l'humidité ambiante un brouillard acide corrosif qui attaquera non seulement les habitations mais aussi les habitants. Fuites, résidus de torchères et a fortiori explosions disséminent les gaz. Ce gaz ensuite retombe sur la population car il est lourd, quand il n'a pas tout simplement dévalé les pentes lors des fuites !

Il n'est pas mentionné comment est réalisée l'étape particulière d'épuration des biogaz pour éliminer le H2S corrosif qui risque à la longue d'endommager les constituants de l'usine. Rappelons que le changement fréquent de pièces à cause de la corrosion participe grandement à diminuer le rendement du procédé.

  • Autres gaz à risque : dans le digestat se trouve aussi H2, lui aussi fortement explosif, servant à la préparation du méthane. Egalement, CO2, gaz à effet de serre, que l'on retrouve à l'issue des torchères. On peut ainsi se poser la question de l'intérêt écologique du procédé, surtout si l'on prend en compte les rotations de véhicules (d'approvisionnement et d'épandage) quotidiennes. Le relargage de gaz ammoniac (NH3) dans l'air n'est pas mieux. On remarquera que la perte en azote lors de l'épandage est accrue par temps venteux. C'est à dire qu'une forte proportion des produits azotés est disséminée (vers les habitations). Pour 1/3 du temps, les vents dans cette localité sont supérieurs à 50 km/h, et 2/3 du temps ils sont supérieurs à 30 km/h ! Il s'en suivra des odeurs incommodantes sur toute la région d'épandage avec des risques d'irritations accrus.
  • Le brûlage des gaz en torchère produit le dioxyde de soufre, lui aussi très irritant et nocif, également responsable de pluies et brouillards acides. Ce brûlage est aussi responsable d'émissions de particules fines, voire nanométriques, dont on ne connaît pas le risque sanitaire.
  • Risques d'incendie, et d'explosion-implosion (comme à Frenoy-Folny en 2012) et de fuites (à de multiples endroits en France). Pour éviter les odeurs, des locaux confinés seront utilisés. C'est avec le confinement que les risques d'explosion augmentent comme le souligne l'ARIA (5). Dans ce projet, aucun plan d'intervention de sécurité n'est détaillé pour les phases transitoires, de réparations, de déchargements, de débordements, nettoyages, d'incompatibilités chimiques ... ne serait-ce que pour garantir la sécurité de secouristes.

L'analyse de risque sur le vécu commence à être réalisable. En Allemagne, pour 8000 installations on dénombre environ un incident (fuite, incendie, explosion, avec ou sans conséquence humaine) par semaine (6), soit 4% de risque d'obtenir un incident par an et par installation. Ce chiffre est loin d'être négligeable !

  • La production de biogaz envisagée et la surface totale d'épandage ciblée satureront les terres en 20 ans en respectant les normes en vigueur de 30 T/ha sur 10 ans (45000 T de production pour 10 ans, soit 45000/30=1500 ha, pour 2200 ha prévus pour l'épandage).

Or, le digestat est un matériau à haut risque en lui-même ! Le rapport de l'ANSES de 2014 dit «L'homologation des digestats n'est pas possible en l'état faute de pouvoir s'assurer de l'innocuité de ces produits tant pour la santé publique que pour l'environnement ». L'ADEME n'est pas plus rassurante dans ses conclusions «La connaissance de l'impact de la digestion sur la valeur agronomique et sanitaire des matières organiques, ainsi que l'impact des digestats sur les propriétés des sols n'est pas suffisamment précis à ce jour ».

Création de nouvelles bactéries de plus en plus multirésistantes pouvant aboutir dans le digestat et être épandues. Dés lors que l'Industrie Agro Alimentaire sera concernée par le projet, on peut craindre de nouvelles contaminations (staphilocoques, botulisme ...) résistantes aux antibiotiques (4) provenant des élevages de plus en plus intensifs. Il n'est pas prévu de pasteurisation ni de compostage hygiénisant du digestat pour éliminer certains agents pathogènes.

  • On note plusieurs écoles dans un périmètre de quelques kilomètres, dont trois très proches et sous les vents dominants d'ouest (Colleville-Montgomery et St Aubin d'Arquenay) et du nord (Bieville-Beuville).
  • L'épandage du digestat aboutira à une pollution des nappes phréatiques, alimentant en eaux potables tous les villages des bassins versants. Remarquons que les formes azotées issues de la méthanisation sont plus sujettes à ruissellements, volatilisation et pénétration souterraine. On note le forage d'eau potable de Hermanville sur Mer et Colleville-Montgomery, pour environ 4800 habitants, proche des zones d'épandage.

Le stockage des digestats de manières réparties correspondra à autant de risques de fuites, répandant odeurs et dangers d'intoxications sur une surface réelle bien plus grande que celle, idéale, déjà supérieure à 20 ha du projet.

  • Le nombre d'emplois généré est inconséquent : 2 personnes ! Ce chiffre montre l'absence de prise de conscience du collectif d'agriculteurs vis à vis de la qualité de leur future production, tant en terme de nécessaires contrôles des intrants que de la sécurité du procédé à tous les niveaux.

La qualification et la formation du personnel sont passées sous silence dans le projet (pourtant recommandées par la FNE dans sa note cadrage), semblant être reléguée au deuxième ordre derrière la sécurité électronique. C'est une erreur grossière devant les risques de défaillances simultanées (qui ne sont absolument pas analysés dans le projet). La caserne de pompiers la plus proche est-elle avertie des risques associés à ce projet ? Est-il prévu une zone réservée sur site pour eux ?

  • Le projet tel qu'il est conçu desservira les agriculteurs eux-mêmes. Les estimations optimistes du rendement dans ce projet sont supérieures typiquement de 10-20% aux rendements effectifs observés en fonctionnement (3). A tel point que certains agriculteurs ont fini par délaisser leur activité principale pour ne plus qu'être producteurs de biogaz ! Comme cela s'est produit dans le passé, le cabinet d'analyse de rentabilité semble avoir exagéré la rentabilité, et sous estimé les risques.
  • L'impact purement olfactif est très sous évalué dans le projet. A peine quelques cent mètres autour du site de l'usine ! Quid des zones de stockages protégées par simples bâches ? Il est nécessaire de positionner des nez électroniques sur des distances suffisantes, pour cartographier les nuisances olfactives avant construction du site, puis en fonctionnement.
  • Nous ne voyons pas dans ce projet comment l'amendement sera réalisé hors digestat. Ce dernier étant faible en matière carbonée (puisque la plus grande partie du carbone est mobilisée pour CH4), un amendement extérieur est nécessaire à la bonne fertilité des sols sur une période longue. Pour une telle surface, d'où pourra venir l'amendement si ce n'est de déchets autres, donc mal contrôlés ?
  • Le manque flagrant de détails chiffrés et de comparaison par rapport à l'existant ne permet pas d'estimer correctement les retombées, positives ou négatives, du projet. Comme seul exemple de ce manque, quel rapport C/N est visé, et quelles garanties de sa constance dans le futur ?

Il n'est pas mentionné non plus le désir d'adhérer au club Biogaz de l'ATEE, pourtant riche d'enseignements sur les conduites les meilleures à suivre !

Conclusions d'analyses

Pour toutes ces raisons nous mettons en garde les autorités sur tous les risques encourus si ce projet venait à aboutir, à court et à long terme dans cette région. Nous alertons les pouvoirs publics sur la nécessité :

  • D'une relocalisation du projet vers les fermes, tel que l'Allemagne par exemple l'a réorienté, et dans une zone en densité de population plus faible
  • D'une révision en profondeur du projet, avec prise en compte réelle des risques, dimensionnements et sécurités, en particulier des risques combinés
  • D'établir une procédure de contrôle en exploitation, par un organisme indépendant du collectif d'agriculteurs ayant déposé le projet. Cette procédure doit inclure la qualité des intrants, la tenue interne de la chaîne de production, et les épandages et stockages