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/ #10864 CONTESTATION DE LA LOI SUR LA LAÏCITÉ DE L'ÉTAT – UN DÉFAUT D'INTÉRÊT JURIDIQUE?

2019-06-19 22:21

 

À la lecture de la demande de contestation judiciaire de la Loi sur la laïcité de l'État déposée hier en Cour supérieure, on constate un détail important dès la page 1.

Il y a trois demandeurs dans cette requête:

- Mme Ichrak Nourel Hak, une personne physique que l'on présume domiciliée à Montréal; actuellement étudiante, elle n'est pas enseignante;

- Le Conseil national des musulmans canadiens (CNMC), une personne morale basée à Ottawa; et

- L'Association canadienne des libertés civiles (ACLC), une personne morale basée à Toronto.

D'emblée, le CNMC et l'ACLC sont des associations -ontariennes-. Ces deux demanderesses sont en réalité des venues d'Ottawa et de Toronto pour venir attaquer une loi québécoise devant les tribunaux québécois alors que celle-ci, par définition, ne peut pas les affecter. Pour tracer un parallèle, cela serait un peu comme si un québécois prenait l'avion pour aller en France et déposer des procédures judiciaires pour forcer la main du gouvernement français dans le mouvement des Gilets Jaunes, venant de l'étranger pour se plaindre de quelque chose auquel il ne participe pas et qui ne le touche pas.

Mme Hak, quant à elle, l'avoue elle-même : elle n'est pas enseignante, elle n'est qu'étudiante. De ce fait, la Loi sur la laïcité de l'État n'affecte aucun de ses droits : aucun service de l'État ne lui est refusé, et aucun de ses acquis n'est menacé. Pour l'heure, son accession à un éventuel poste d'enseignante est hypothétique, et son seul véritable statut est celui d'étudiante – or, ce statut ne lui confère aucun droit particulier quant à un métier ou une profession qu'elle n'exerce pas encore. Non seulement, elle pourrait échouer ses études et ne jamais devenir enseignante dès le départ, mais au surplus, son statut d'étudiante n'a aucune valeur contractuelle ou légale à l'endroit de l'État. Le fait d'être étudiant dans un domaine X ne confère, absolument pas et jamais dans cent ans, un quelconque « droit » d'exercer un métier connexe à son domaine d'études suite à l'obtention de son diplôme. La question aurait pu être différente s'il avait été question d'une enseignante voilée embauchée entre le 27 mars 2019 et l'entrée en vigueur de la loi, ou encore, à la limite, pour une diplômée voilée qui tenterait de postuler pour un emploi et qui se serait fait refuser l'embauche en entrevue (ce qui ne voudrait en rien dire que la demande serait fondée, mais à la limite il y aurait au moins quelque chose de factuel à quoi se raccrocher pour justifier de s'adresser aux tribunaux) – mais ce n'est pas le cas de Mme Hak.

Conséquemment, à mon humble avis, ceci semble fortement indiquer que nous avons là un défaut d'intérêt juridique selon les termes de l'article 85 du Code de procédure civile :

« 85. La personne qui forme une demande en justice doit y avoir un intérêt suffisant.

L’intérêt du demandeur qui entend soulever une question d’intérêt public s’apprécie en tenant compte de son intérêt véritable, de l’existence d’une question sérieuse qui puisse être valablement résolue par le tribunal et de l’absence d’un autre moyen efficace de saisir celui-ci de la question. »

Selon la jurisprudence (voir notamment les affaires Chaoulli et Henderson), lorsqu'il est question de contestation de la validité d'une loi, le demandeur doit être « directement touché » par celle-ci pour se réclâmer d'un intérêt juridique. On ne parle pas ici d'une simple « intervention » à un dossier déjà ouvert et existant, où là les critères sont plus permissifs, mais bien du statut de « demandeur » par lequel on ouvre un dossier et on créé une instance.

Or, le CNMC et l'ACLC, étant des associations ontariennes qui, à la lecture des procédures n'ont pas semblé juger pertinent d'avoir d'établissements au Québec à partir desquels saisir les tribunaux québécois, elles ne peuvent -par définition- pas être touchées par une loi québécoise. Quant à Hak, vu qu'aucun de ses droits acquis, actuels ou éventuels n'est affecté, il est pour le moins extrêmement difficile de la voir directement touchée par la loi.


Bien évidemment, il ne s'agit que d'une réflexion juridique matinale produite ici en quelques minutes en prenant un café, et je suis sûr qu'un juriste adverse créatif pourrait penser à des arguments en défense pour chercher à y répondre ou à y remédier (d'un côté comme de l'autre, tout se plaide) – mais si j'étais à l'emploi du Procureur général du Québec, j'envisagerais sérieusement d'invoquer l'article 168 (3°) du Code de procédure civile pour faire déclarer la demande irrecevable :

« 168. Une partie peut opposer l’irrecevabilité de la demande ou de la défense et conclure à son rejet dans l’une ou l’autre des circonstances suivantes:
 (…)
3° l’une ou l’autre des parties n’a manifestement pas d’intérêt. »

Car, n'en déplaise à Mme Hak, un sentiment de scandale politiquement correct et une impression de rêve déçu ne sont pas en soi constitutifs de droits. Et, n'en déplaise aux CNMC et ACLC ontariennes, on les invitera respectueusement à se mêler de ce qui les regarde – ce à quoi on peut émettre de singulières réserves concernant le droit québécois.

- François Côté, Avocat


Tiens toé, prenez votre trou et mêler vous de vos affaires les Ontariens, allez brasser de la marde dans votre province.