Aujourd'hui, les étudiants de l'ENSNP sont en grève pour revendiquer le dépôt d'un rapport d'étape à la Commission des Titres d'Ingénieurs, comme prévu dans le projet initial de leur école, et, plus récemment, dans le contrat d'établissement signé par leur direction et leur ministère voilà moins d'un an. Aujourd'hui, cette école d'ingénieurs de la nature et du paysage (et pas seulement du paysage) est poussée à perdre son titre et sa pédagogie, sous la pression d'un ministère qui veut uniformiser rapidement les écoles et les formations dans un diplôme d'état de paysagistes, au détriment de pédagogies innovantes et singulières, au détriment de l'avenir de nos territoires.
La pédagogie particulière de l'ENSNP développe l'idée que le paysagiste de l'avenir doit être formé en cinq ans d'études continues, et qu'il doit associer à son métier, d'une part la connaissance de l'espace, de ses techniques de représentation, des sociétés, de la communication, de l'économie et de la politique ; d'autre part une connaissance de la botanique et des végétaux, de la pédologie, de l'hydrologie, de la géographie et d'autres sciences de l'ingénieur qui nourriront son métier futur. L'aménageur et le paysagiste de demain ne doivent plus dessiner les projets sans conscience des fonctionnements de l'espace vivant sur lequel ils interviennent. L'aménageur et le paysagiste de demain doivent avoir une conscience large du monde et de ses phénomènes pour que l'homme puisse s'y associer et non s'y imposer.
Le projet pédagogique qui est aujourd'hui imposé avec l'abandon du titre d'ingénieur, ressemble à une mise au pas rapide qui risque de concourir à la perte d'une diversité nécessaire dans les formations. (La meilleure agence est sans doute celle qui recrute dans la diversité des élèves de Versailles, Marseille, Lille, Bordeaux, Angers, Blois, ITIAPE et ESAJ.) Il fait faire marche arrière à la diversité de nos professions et aborde le paysage dans un référentiel de seulement trois ans (années +3,4,5 après bac) qui ne correspond pas au processus de Bologne, dont le contenu est très large et encore mal défini, et dont le possible financement d’années supplémentaires pour les établissements concernés (années 1,2 ou +6) reste encore très flou. De plus, les enseignants des autres écoles travaillent activement à ce référentiel depuis de nombreux mois, voir années pour essayer de s'entendre autour d'un référentiel commun ; Blois va t'il vraiment pouvoir s'y intégrer en conservant ses spécificités en l'espace de 6 mois alors même qu'elle n'avait pas participé à ce long travail pédagogique?
Dans de telles conditions, cette décision d'abandon du titre parait bien hâtive, et fait courir de grand risque à cette petite école de plus en plus reconnu qui ne peut plus communiquer au futur inscrits si elle délivrera un diplôme l'an prochain.