Lettre ouverte des personnels et des usagers de l'ENS de Lyon

Lyon, le 11 mai 2016

Ce matin à 7h, les étudiant.e.s qui occupaient pacifiquement depuis le 25 avril la salle F01 du bâtiment Descartes de l'ENS de Lyon en ont été expulsé.e.s de force par la police. Cette intervention d'une trentaine de policiers a été suivie d'un communiqué de Jean-François Pinton, président de l'ENS de Lyon, justifiant ce recours à la force. Dans la soirée, un second communiqué de la présidence a notamment réitéré la proposition de mise à disposition d'une salle, sous certaines conditions.

Nous, membres de la communauté des personnels et des usagers de l'ENS de Lyon, tenons à exprimer notre indignation devant cette intervention policière, qui est inédite dans l'histoire de notre établissement, et à dire notre inquiétude devant le climat général dans lequel elle s'inscrit. Cette décision a été prise à l'initiative de la seule direction alors que l'établissement n'était soumis à aucune menace particulière. Elle prolonge la répression subie par le mouvement social et étudiant actuel et revêt de fait une dimension politique.

Le mouvement que cette intervention policière réprime est né dans le cadre de l’opposition nationale à la Loi Travail. C’est dans le cadre des manifestations contre la Loi El Khomri et de la Nuit Debout lyonnaise qu’est apparue l’idée d’ancrer cette mobilisation au sein de notre établissement. En deux semaines est né un foyer de discussion et de partage autour de diverses questions politiques et sociales. Des diffusions de films, des petits-déjeuners avec le personnel (restauration, sécurité, logistique, informatique, gestion, maintenance...), des assemblées générales chaque midi, des débats, des rencontres et des conférences dans la journée, des banquets le soir ont été organisés.

Pour justifier la répression de ce mouvement, la présidence affirme que les occupants transforment l’École en "une zone de conflit et d’opposition stérile, voire caricaturale" et promeuvent "l'affrontement". Nous nous inscrivons en faux contre ces allégations. Celles et ceux d'entre nous qui se sont rendu.e.s en salle F01 ont plutôt été les témoins de rencontres entre étudiant.e.s, avec les enseignant.e.s et les chercheure.e.s, les personnels administratifs et techniques, pour dégager, entre autres, des points d'accord sur ce qui pourrait aller mieux dans notre école. Au moment même où un mouvement dénonce une politique de renfermement de l'ENS sur elle-même, le recours à l'intervention policière semble donner brutalement corps à ce diagnostic..

Face à la violence que représente cette intervention policière disproportionnée, nous tenons donc à rappeler que l'occupation de la salle F01 s'est déroulée jusque-là dans le respect, sans aucune violence. Elle n'a empêché ni la circulation dans l'établissement, ni la tenue des cours et les occupant.e.s n'ont eu de cesse de dialoguer avec le personnel pour prendre en charge au mieux les désagréments qu'aurait pu occasionner une présence continue sur les lieux.

Dans ces conditions, nous condamnons avec la plus grande fermeté l'intervention de la police, nous exigeons qu'aucune poursuite, qu'aucune espèce de sanction ne soit prise contre les personnes qui ont participé à l'occupation de la salle évacuée, et demandons la mise à disposition effective d'un lieu pour le mouvement.


Collectif de personnels et usagers de l'ENS de Lyon    Contacter l'auteur de la pétition